C’est dans la presse...
Article du 31 mai, « Pavé de l’Assurance »
Dans le Pavé de l'Assurance:
GROUPE PRÉVOIR : UNE AG PLEINE D’IMPRÉVUS ?
Le 4 juin prochain, le Groupe Prévoir tiendra son Assemblée Générale annuelle.
Celle-ci pourrait se révéler un peu tendue et compliquée pour Patricia Lacoste, certains actionnaires étant décidés à mettre les pieds dans le plat en posant des questions précises, mais qui induisent une remise en question de la stratégie et de la gouvernance de l’actuelle dirigeante.
Il faut dire que le Groupe Prévoir est un résidu de ce qu’était l’assurance privée avant la dernière guerre mondiale : un secteur très lucratif entre les mains de quelques familles privilégiées, héritières d’entrepreneurs avisés.
Aujourd’hui, Prévoir est l’un des tout derniers vestiges de cette époque qu’est venu rejoindre Christian Burrus, sans doute le dernier entrepreneur-assureur non mutualiste.
Derrière la SCP, la société holding du groupe Prévoir se cache la SARGEP, une société que détient à 99,41% Prévoir Vie.
L’objet social de la SARGEP est d’acheter les actions de la Société Centrale Prévoir si un actionnaire vendeur ne trouve pas d’actionnaire preneur.
Pour autant, il semble que les actions de la SARGEP demeurent relativement opaques : combien d’actions de la SCP détient-elle à la date du 4 juin 2020, combien en détenait-elle l’année passée à la même date, à quel prix les transactions se sont-elles effectuées, comment sont nommés les administrateurs de la SARGEP, pourquoi reçoivent-ils 9000 euro de jetons de présence alors que la SARGEP n’est qu’un véhicule d’auto-contrôle ? Pourquoi parmi les administrateurs, on trouve une certaine Nathalie Louat, née Merlin, sœur de Patricia Lacoste ? Par quels enchantements s’est-elle retrouvée administratrice de la SARGEP ? Autant de questions et même davantage pour lesquelles il semble difficile d’obtenir des réponses.
Au-delà des activités de la SARGEP, la stratégie de Patricia Lacoste semble également contestée. Cible numéro 1 de ses détracteurs : l’activité « courtage » du groupe et plus particulièrement le rachat du courtier AssurOne pour peu ou prou une centaine de millions d’euro.
L’activité « courtage » perdrait encore 6 millions d’euro cette année.
Pour justifier les sommes investies, Patricia Lacoste avait imaginé lors de l’AG 2019 que l’ensemble des activités courtage du groupe réaliserait un résultat net de 11 millions d’euro en 2021.
Une promesse qu’il paraît difficile de maintenir cette année, surtout après le choc lié à la Covid-19… Dans ces conditions, il parait naturel de s’interroger sur les raisons qui font que cette société, créée en 2004, perde de l’argent sur ces trois derniers exercices. Et pourquoi dès lors considérer qu’il s’est agi d’un bon investissement justifiant d’investir près de 100 millions d’euro pour l’acquérir ?
Quant aux activités internationales de Prévoir, (Portugal, Pologne, Brésil, Cambodge, Vietnam), elles posent également questions.
Après environ un quart de siècle de « développement » international réalisé par Prévoir, on peut se demander quel fut l’intérêt pour le groupe et ses actionnaires de cette diversification ?
Reste enfin la rémunération de Patricia Lacoste qui semble également interpeler.
En effet, entre 2013 et 2019, le groupe semble avoir enregistré les contre-performances suivantes :
chute de 10% du chiffre d’affaires d’assurances en France,
destruction de valeur des activités à l’International,
baisse de 25% du bénéfice par action de la Société Centrale (8,61 euros versus 6,44 euros),
baisse de 36% de la rentabilité des capitaux propres comptables à 5,3% au lieu de 8,3%,
baisse de 25% du rendement du dividende sur action à 3% au lieu de 4%,
baisse de 22% des effectifs du réseau salarié,
baisse de 50% des affaires nouvelles.
Mettons maintenant de mettre ce bilan en comparaison avec la rémunération globale de Patricia Lacoste.
En cinq ans entre 2014, date de plein exercice des fonctions de Présidente Directrice Générale du Groupe et l’exercice 2019, les émoluments de Madame Lacoste ont augmenté de 35% pour s’élever à 469 000 euros.
Sur le seul exercice 2019 qui accuse une chute de 20% du résultat consolidé par rapport à 2018, la hausse de la rémunération de Madame Lacoste est d’environ 20% ce qui est parfaitement inédit dans l’histoire de ce groupe qui a vocation à assurer une clientèle populaire à revenus très modestes.
Pour rappel le salaire moyen d’un collaborateur de réseau « debout » est d’environ 35 000 euros par an et l’augmentation générale accordée aux salariés de l’ordre de 1,7%.
Compte tenu des résultats de la politique menée par l’intéressée, comment le conseil d’administration et le comité des rémunérations justifient-ils une telle augmentation des émoluments de Patricia Lacoste ? Quelles ont été ses réflexions ? Et celle de l’administrateur indépendant ?
Une AG pleine d’imprévus qu’on vous dit
Jacques de Baudus
Article du 7 juin, « Pavé de l’Assurance »
PRÉVOIR : L’AG OÙ L’ON ENTENDIT LES BOULETS VOLER
Nous annoncions la semaine dernière qu’il se tiendrait le 4 juin l’Assemblée Générale Ordinaire du Groupe Prévoir, et qu’elle s’annonçait particulièrement tendue, quelques actionnaires ayant préparé des questions susceptibles de fâcher la Présidente et ses allié(e)s.
Le moins que l’on puisse dire est que notre anticipation s’est révélée exacte.
Les canons ont tonné et les boulets volèrent bas.
Bien évidemment, celles et ceux qui avaient renseigné Le Pavé de l’Assurance ont été fustigés au même titre que notre support, sans pour autant être nommés puisque nos sources ne sont évidemment pas identifiées. Emmanuel du Boullay, l’administrateur « indépendant » mis en place par Bertrand Voyer et conservé par Patricia Lacoste stigmatisa les administrateurs ayant « cru bon » (sic) de divulguer de fausses informations illustrées par des références inexactes. Notre support en prit aussi pour son grade ce qui est assez curieux puisqu’aucun abonnement n’a été souscrit par quiconque de la galaxie Prévoir ! On se demande quelle taupinette aura relayé notre article ! Espérons qu’elle aura signalé ce transfert au Centre d’Exploitation du Droit de Copie !
Au cours de l’assemblée de Prévoir, la plupart des questions recensées dans notre papier de la semaine dernière ont reçu des réponses très vagues, la direction se retranchant dans un mutisme d’inspiration « soviétique ». Sans le citer, Patricia Lacoste a regretté l’existence du blog https//:associesprevoir.fr sur lequel sont postées des informations et des analyses sur le groupe qui intéressent pourtant beaucoup d’actionnaires, alors qu’elle devrait au contraire s’en féliciter et participer aux discussions. Il doit exister, dans l’intérêt de tous les actionnaires, un vrai débat sur les sujets qui intéressent Prévoir.
Emmanuel du Boullay s’est montré quant à lui très singulier dans ses réponses quand il s’est agi d’évoquer la gouvernance du groupe.
A la question légitime d’un actionnaire sur la raison pour laquelle cette société est dirigée par des membres issus des familles plutôt que par des professionnels du secteur, comme ont choisi d’opérer L’ORÉAL ou d’autres sociétés à capitaux familiaux, l’auto-nommé spécialiste en gouvernance a jugé que la question n’était pas pertinente car la famille Bettencourt, selon lui, constitue de petits minoritaires ! Étonnante réponse quand on sait que les Bettencourt possèdent 28% du capital ainsi que 3 de ses membres au conseil d’administration… Rappelons que Patricia Lacoste représente une branche qui ne pèse, elle, qu’environ 4% du capital.
On peut en outre se demander si « l’essentiel d’une carrière à la SNCF » prépare adéquatement à la gestion d’une PME dans l’assurance de personnes soumise aux dures lois de la concurrence. De même, il est pertinent de s’interroger sur la présence d’un directeur général délégué, Edouard Bidou, qui n’est pas un professionnel reconnu du secteur de l’assurance et des réseaux salariés mais un cousin, médecin de santé publique, avec une très modeste expérience au sein de la mutuelle étudiante SMEREP qu’il présida pendant 3 ans. Dans l’intérêt du groupe et de ses actionnaires, compte tenu des enjeux, certains estiment qu’il serait sans doute judicieux de diversifier le recrutement vers des profils aux compétences plus classiques, susceptibles de rassurer, notamment le réseau salarié en proie à de lourds états d’âme.
Emmanuel du Boullay est, selon lui, un grand spécialiste de la gouvernance. A la dernière réunion du club des actionnaires de Prévoir, il a été présenté comme l’un des fondateurs de l’Institut Français des Administrateurs et comme « professeur à Sciences Po ». Dont acte.
Pourquoi alors, quand est discuté du fonctionnement de la SARGEP, véhicule d’auto-contrôle du groupe, a-t-il refusé de répondre aux questions portant sur la liquidité du titre, sur l’égalité de traitement entre les actionnaires, sur la disparition soudaine de la décote du pacte Angot, sur la désignation des 6 administrateurs de la SARGEP et la justification de leurs jetons de présence ? Au demeurant, il semble ignorer que la SARGEP est bien membre du pacte Angot en tant que Tiers candidat acquéreur et donc bien évidemment agréée par la gérance du pacte Angot.
Le pacte Angot du nom d’André Angot le fondateur emblématique du groupe, est un pacte d’actionnaires qui regroupe environ 49% du capital dont les familles Merlin (celle de Patricia Lacoste) et Bidou (comme Edouard). Ce sont essentiellement des actionnaires familiaux héritiers d’André Angot mais on y retrouve d’autres familles alliées comme les Moreau ou Gaullier (tous représentés au conseil bien sûr)… Le pacte a été créé initialement pour se défendre d’un risque d’offre hostile. Le problème que rencontre Patricia Lacoste aujourd’hui est le suivant : dans ce pacte il y a déjà 10%, des 49% du capital, très directement issus de la branche Angot, qui ne lui font plus confiance.
Initialement le pacte justifiait une décote de 10% par rapport au prix hors pacte. Mais pour acheter le silence d’actionnaires récalcitrants, membres du pacte, Patricia Lacoste a fait racheter par la SARGEP leurs actions sans décote et donc décider qu’il n’y avait plus de décote dans le pacte.
Pourquoi Emmanuel du Boullay juge-t-il que la SARGEP peut acheter les actions de la SCP comme elle le veut, à qui elle veut, puis les revendre à qui bon lui semble, au mépris du principe fondamental d’égalité de traitement des actionnaires, et ceci dans la plus grande obscurité ? Est-ce à dire qu’elle peut également refuser des demandes de rachat de certains actionnaires ?
Enfin, pourquoi Emmanuel du Boullay trouve-t-il normal que les dirigeants du groupe qui disposent de ces informations achètent des actions avec une décote de 25% sur la valeur des fonds propres comptables ? (Pour information, le groupe dispose au 31/12/19 d’un milliard et demi de plus-values latentes dont la moitié appartient aux seuls actionnaires.)
Emmanuel du Boullay étonna aussi quelques actionnaires par ses appréciations sur la rémunération des dirigeants du groupe. Apparemment, il ne voit pas de difficulté, au regard des « meilleurs standards de gouvernance », au fait que le comité des rémunérations soit composé d’un cousin germain de la dirigeante du groupe et d’un membre d’une famille alliée, curieusement sur-représentée au conseil d’administration. La bonne gouvernance commanderait plutôt de prévenir tout risque de conflits d’intérêts ; un administrateur indépendant, dans l’intérêt de tous les actionnaires, devant être particulièrement exigeant sur ce point.
D’autant qu’après un long exposé sur la gouvernance d’entreprise l’année dernière, Emmanuel du Boullay avait cru bon d’expliquer aux actionnaires de la SCP réunis pour la première réunion du Club des actionnaires en novembre 2019, que sa fonction d’administrateur indépendant de Prévoir représentait « un mois et demi de travail ».
En 2019, il n’aura touché qu’entre 45 et 50000 euro de jetons de présence pour ce mois et demi de travail.
A sa place, on demanderait une petite augmentation !
Jacques de Baudus